Travail. Combats et utopies

Publiée en 2017, la revue sortait suite à la réforme du code du travail. Les coordinateurs s’interrogeaient sur la vision sous-tendue par cette loi. Il paraît pertinent de se replonger dans ce décryptage d’expériences, discours et luttes internationales.

En première partie, sont abordées les tensions entre progrès technologique et emploi d’une part, entre le besoin de liberté dans la vie professionnelle et personnelle d’autre part et ceci au regard des acquis de la protection des salariés. Andrea Fumagalli présente les “salariés-vouchers” ce qui interroge le contrat de travail. Il est question de renouveau du paternalisme (Ibrahim Warde). Un article de Jacques Le Goff publié en 1988 dresse le constat d’un droit du travail nivelé par le bas depuis 1983, la vision serait-elle inchangée ? François-Xavier Devetter et François Horn mettent en lien emploi à domicile et précarité subventionnée. La maltraitance que subissent les travailleurs immigrés est présentée par Akram Belkaïd. La recherche de croissance au détriment des travailleurs (Serge Halimi) thème incontournable précède un article sur les travailleurs détachés et les fraudes associées (Gilles Balbastre) ainsi qu’un sur les travailleurs du clic (Thibault Henneton). En somme un état des lieux des nouveautés et mutations à l’œuvre de part le monde.

En deuxième partie, la revue revient sur 2 outils essentiels que sont le droit du travail et les syndicats au service de la protection des salariés ; outils qui se voient aujourd’hui attaqués aussi bien par le patronat que le gouvernement, parfois avec la complicité des syndicats. Certains syndicats historiques auraient-ils tendance à niveler par le bas (Jean-Michel Dumay) ? La rupture conventionnelle, une règle et des usages, d’après Céline Mouzon elle serait peu favorable aux travailleurs. Jouer à travailler pour gagner de l’argent est une attraction, (in)désirable (Mona Chollet) ? Un coup d’œil dans le rétro permet de mettre en regard la marchandisation d’activités domestiques et la précarisation de travailleurs, un article d’André Gorz publié en 1990. Rachel Saada défend le code du travail et invite les travailleurs à se ressouder. L’inversion de la hiérarchie des normes et ses conséquences en matière de dialogue social est développée par Martine Bulard.

Publié en 1998, un article de Robert Castel affirme que le salariat ne disparaît pas mais que la précarité gronde. Alors que l’Uruguay vit un renouveau du syndicalisme (Christophe Ventura), la France privatise l’accès au droit (Hélène-Yvonne Meynaud). En Ardèche et dans la Somme, les aides à domicile se fédèrent (Pierre Souchon). Qui l’eut-cru, la grève en Chine a fait effet (Philippe Descamps). Pour conclure, Alain Supiot nous partage sa réflexion pour un droit du travail “au-delà de l’emploi” et plaide pour une distribution des responsabilités.

Alors que les tiers-lieux permettraient de travailler autrement, de renouveler les rapports au travail, posons-nous quelques questions : qui sont les travailleurs en tiers-lieux ? au service de qui et de quoi œuvrent-ils ? dans quelles conditions ? est-ce librement choisi ? Finalement est-ce que la promesse du “travailler autrement” est claire ? Et si les travailleurs en tiers-lieux se soudaient, se ralliaient à toutes celles et ceux qui travaillent hors tiers-lieux pour bâtir un droit du travail “au-delà de l’emploi” avec une redistribution des responsabilités tels qu’Alain Supiot suggère ?

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